Ce blog n'a pour autre ambition que de s'arrêter un moment à l'heure où tout va excessivement vite. Comme un arrêt sur image suivi d'un zoom. En somme, il suspend la parole en l'air pour l'inscrire, quelque part, dans l'ère.

mardi 29 janvier 2013

Un sondage, plusieurs lectures

Jeudi dernier, le journal Le Monde publiait un sondage réalisé avec l'IPSOS, le Cevipof et la fondation Jean Jaurès sur les fractures de la sociétés française. Parmi toutes les données du sondage, c'est la défiance envers la religion musulmane qui a le plus retenu l'attention. Mais il y a toujours plusieurs façon d'interpréter une enquête d'opinion.


Le sondage en question le voici (la partie ayant le plus intéressé les médias se résumant aux deux premiers graphiques) :



Naturellement, on a déduit de ce sondage que la société française rejetait l'islam, ou tout du moins qu'elle la jugeait beaucoup moins tolérante et beaucoup moins compatible avec les valeurs de la République que les deux autres religions évoquées, la religion catholique et la religion juive. Les représentants du Front National comme certains de l'UMP se sont d'ailleurs fendus d'un "on vous l'avait bien dit", constatant par là que les Français sont en accord avec les idées qu'ils prônent. Comment critiquer cette lecture? Après tout c'est bien ce que dit ce sondage.

C'est vrai. C'est bel et bien ce que dit ce sondage. Cependant, une autre lecture de ces résultats est également possible. A rebours de ce que nous disent certains responsables politiques sur l'invasion des étrangers et des plus particulièrement des musulmans, je constate que la France reste dans son immense majorité catholique. Voilà ce qui me frappe moi. Attention, loin de moi l'idée de dire que la France est chrétienne par nature ("France fille aînée de l'Église") comme on l'a entendu parfois. Ce serait ignorer qu'avant d'être chrétienne, la France a été polythéiste et païenne. Les Francs sont d'ailleurs à l'origine un peuple païen. Mais effectivement la religion chrétienne s'est par la suite développée en Europe et s'y est installée (en écrasant les autres croyances). Passons sur ce petit cours d'histoire. Ce qui ressort de ce sondage c'est que la France est encore largement chrétienne. Séchez vos larmes, l'invasion n'est pas encore pour tout de suite.

Cela mérite quelques explications. Ce sondage n'a en fait pas beaucoup de sens. Pour simplifier en employant une métaphore triviale, cela revient à demander à des Marseillais quelle équipe de football ils trouvent la plus forte entre l'OM, le PSG et l'Olympique Lyonnais. Prenez ce même sondage, allez le faire dans un pays musulman et vous obtiendrez les résultats inverses. Et il y a tout à parier que si le sondage avait été réalisé en Israël, la religion juive aurait été désignée la plus tolérante. Pour que ce sondage ait un petit sens il n'aurait fallu interroger que des athées, et encore! En l'état, il nous offre principalement un tableau des principales composantes de la société française en matière de religion.


On peut en effet supposer, mais ce n'est là que mon avis personnel, que la religion catholique n'est pas plus tolérante que ses deux consoeurs. Un coup d'oeil dans le rétroviseur historique permet de s'en convaincre. Il suffit de se pencher sur la Saint Barthélémy ou sur les croisades (à la fois contre les "infidèles" en terre sainte, et à la fois contre les dissidents hérétiques en France même (les Cathares pour ne citer qu'eux)) pour admettre que la religion catholique a son lot d'intolérances. Il faut bien voir que son statut en France a changé au cours des derniers siècles. Elle n'est plus religion d'Etat, elle est reléguée dans la sphère privée, les croyants se font de moins en moins nombreux. Mais attention je parle des vrais croyants, pas ceux qui se rendent à l'église une fois par semaine. Je parle de ceux pour qui l'excommunication signifiait la mort, de ceux qui étaient prêt à aller mourir en terre sainte parce qu'on leur promettait la rémission de leurs pêchés, de ceux qui devaient payer des impôts à l'Église, de ceux dont la vie toute entière tournait autour de leur paroisse. Cette emprise de la religion chrétienne a disparu en France. Il est fini le temps où le seigneur et le prêtre étaient les seuls repères des habitants. En Israël, la religion juive a suivi à peu près la même évolution, même si le pays reste par nature un État juif. Mais en ce qui concerne l'Islam, il reste des régions, voire des pays où la religion règle encore tout, où elle a encore le pouvoir qu'avait la religion chrétienne au Moyen-Âge, d'où son "intolérance". Seulement ce serait une erreur d'en déduire qu'elle est moins tolérante que ses soeurs. La religion catholique a évoluée, mais redonnez lui le pouvoir qu'elle avait sur la société aux temps des croisades et il n'est pas exclu que l'intolérance la plus flagrante revienne.

On nous a déjà parlé du caractère humaniste et bienfaisant de la religion catholique. C'est entièrement vrai. Mais c'est le cas aussi dans la religion juive, dans la religion musulmane aussi, et dans d'autres religions, et chez les athées... En fait il s'agit de quelque chose propre aux hommes. Cela prend simplement des formes différentes selon les cas.

vendredi 25 janvier 2013

Parlons de tout sauf des gays! Le point de vue d'une étudiante en communication


Quelle stratégie de communication adopter pour un sujet comme le mariage gay, porteur d’oppositions aussi fortes ? Le gouvernement Ayrault a choisi de s’inscrire dans une tradition socialiste s’appuyant sur les valeurs d’égalité et de liberté. Ainsi a été lancé le projet d’ouverture du mariage aux couples gay, rebaptisé opportunément: « mariage pour tous ».


Une communication gouvernementale tout en subtilité et en sous-entendus pour un sujet potentiellement explosif


Toute la communication du gouvernement s’articule donc autour de cette notion phare d’égalité. Ainsi David Assouline, porte-parole du Parti Socialiste, déclare à propos de la manifestation contre le mariage pour tous : «une manifestation pour empêcher certains d'avoir les mêmes droits, c'est très rare, seule la droite sait faire ça !» tandis que Christina Taubira met en avant l’égalité des droits pour tous les citoyens quelle que soit leur origine sociale, ethnique… et quelle que soit leur orientation sexuelle ! En parlant de « citoyens », elle veut faire passer l’orientation sexuelle au second plan du débat. D’ailleurs le projet de loi, c’est celui du « mariage pour tous » et non celui du « mariage gay ». Mariage pour tous cela pourrait tous aussi bien vouloir dire mariage pour les jeunes, les vieux, les étrangers, les chômeurs. C’est une manière implicite de faire comprendre que de ne pas accorder le mariage aux homosexuels est aussi absurde que de ne pas l’accorder aux chômeurs par exemple ! Bon moyen de dénoncer en creux les discriminations liées à l’orientation sexuelle. Belle ambigüité aussi car si on pousse la logique au maximum, « mariage pour tous » cela peut aussi vouloir dire mariage avec son frère ou sa sœur, ce qui renvoit  à un des plus grands tabous de notre civilisation : l’inceste !

Derrière la formule « mariage pour tous » se cache donc une habilité communicationnelle mettant en avant des aspérités positives (la notion consensuelle d’égalité) et gommant les aspects qui pourraient faire polémique. La formule est facilement mémorisable, simple et compréhensible : tous les ingrédients d’un bon slogan. Mais cela suffit-il à faire adhérer tous les citoyens à ce projet de loi ?

Provoc + humour = médiatisation forte


Face à cela les opposants au mariage gay auraient pu mettre en avant une porte parole conservatrice, droite dans ses bottes, à la vertu jamais remise en cause. Eh bien non ! En communication il faut frapper là où personne ne vous attend ! C’est donc l’humoriste Frigide Barjot, à l’image fofolle de femme libérée - en réalité femme de droite engagée dès les années 80 au RPR et catholique convaincue - qui deviendra l’égérie du mouvement de contestation. Pourquoi est-ce un très bon choix communicationnel ? D’abord parce que les paradoxes et le côté gentiment provocateur d’une femme comme Frigide Barjot (son nom annonce la couleur), c’est une exposition médiatique assurée. Et en effet, la porte parole est invitée sur tous les plateaux de télévision et de radio. Le « buzz » est lancé et le mouvement peut alors monter en puissance. Ensuite parce que pour fédérer des militants très diversifiés il faut une égérie non conventionnelle. Frigide Barjot touche à la fois les jeunes, grâce à son côté fêtard, les cinquantenaires, les catholiques, les non-croyants. De plus, elle décomplexe les personnes modérées qui sont contre le mariage pour tous mais qui n’osent manifester de peur d’être perçus comme réactionnaires.

Grâce à son humour et à son franc parler, elle réussit à s’attirer la sympathie. Son look (on a pu souvent la voir avec une veste de jogging rose bonbon) lui donne une allure « cool » et surtout inoffensive. Très loin de l’image des militants radicaux de Civitas, Frigide Barjot apparait comme une femme moderne et ouverte d’esprit qui défend le droit des enfants. Son émotivité permet au public de s’identifier à elle, elle confie dans toutes les interviews : « J’ai énormément souffert du divorce de mes parents. Je crois que c’est l’un des ressorts de mon combat pour la famille ». Mais Frigide, pas si barjot que ça, a surtout compris que pour étendre le mouvement des « anti », il fallait dépolitiser et décléricaliser la revendication. Elle a de l’expérience puisqu’elle a travaillé plusieurs années dans l’agence de communication politique « Principes » qui géré la campagne de Jacques Chirac en 1995.

Une recette vieille comme le monde


Prendre pour figure de proue une femme afin d’adoucir des idées qui pourraient paraitre trop d’extrême droite. Une certaine Marine Le Pen a appliqué la même recette … Mais il ne faut pas s’arrêter à l’allure légère de Frigide Barjot chantant « Fais-moi l’amour avec les deux doigts ».  En réalité, pas si ouverte que cela sur les sujets de société, elle milite contre l’avortement, contre l’euthanasie, contre le mariage gay et contre l’assistance médicale à la procréation (PMA) y compris pour les couples hétérosexuels. La communication ne peut travestir la réalité bien longtemps...


par A.A., étudiante en communication.

lundi 14 janvier 2013

Le mariage pour tous, première partie : de l'histoire et des notions


En matière de mariage pour tous, les positions de chacun sont pour le moins complexes et diverses. Il y a les homosexuels favorables au mariage, les homosexuels qui sont contre, les hétéro qui sont pour, les hétéro qui sont contre. Il y a ceux qui sont homophobes, il y a ceux qui n'ont rien contre les homos mais qui sont contre le mariage. Il y a ceux qui sont pour le mariage et pour l'adoption et pour la procréation médicalement assistée, il y a ceux qui sont pour le mariage et l'adoption mais pas la PMA, il y a ceux qui sont pour le mariage mais contre l'adoption. Et il y a aussi ceux qui n'en ont rien à faire, il ne faudrait pas les oublier. Bref, il faut de tout pour faire un monde, et tout ce petit monde est en ébullition.




Perspective historique - sauvegarder l'ordre


La France est divisée sur la question du mariage pour tous. Mais pense-t-on que cette division est nouvelle? Si oui, on fait fausse route. Les débats qui agitent actuellement notre société ne datent pas d'hier. Il s'agit en fait d'un éternel recommencement.

Sans remonter aux calanques grecques, je voudrais néanmoins m'arrêter sur une date importante du 19ème siècle: le 27 juillet 1884. Ce jour là, la loi Naquet rétablit le divorce en France, du moins en partie. Le divorce par consentement mutuel n'est pas reconnu (il faudra attendre 1975), seul l'est le divorce pour faute. Cette année là, et les années qui précèdent, les débats sont âpres entre les opposants et les partisans du divorce. Et déjà, il y a 129 ans, on retrouve les mêmes arguments que ceux développés aujourd'hui. La logique est en effet la même. Je vous propose ici des extraits des débats à la chambre des députés le 6 mai 1882:

Monsieur le député des Deux-Sèvres, Henri Giraud : "Messieurs, le divorce que vous demandez aura des conséquences déplorables. Il jettera le trouble dans les ménages, le trouble dans la société ; il attente au bonheur des époux, au bonheur des familles, au bonheur des enfants. Et par conséquent il faudrait quelque chose de très grave, un besoin impérieux, une exigence extrême de ceux que nous représentons ici, pour que nous rétablissions un pareil principe, quand depuis si longtemps l'usage en est aboli. Il faut craindre aussi, messieurs, que le divorce ne provoque l'adultère dans certains ménages (...)".

Un peu plus tôt, ce même député disait également ceci  : "Maintenant, voulez-vous arrêter votre attention sur le sort des enfants? (...) Je voulais, l'autre jour, établir un arbre généalogique afin de me rendre compte de ce que serait la situation des enfants nés de plusieurs mariages successifs, et j'ai trouvé que c'était inextricable. Tout ce que je sais, c'est qu'avec le divorce la situation des enfants sera cent fois pire que sous le régime de la séparation des corps qui est aujourd'hui notre loi. Les enfants auront beaucoup à souffrir, physiquement et moralement."

On retrouve déjà ici les principaux thèmes abordés par les opposants au mariage pour tous : le modèle de la famille en péril, la décadence de la société, le danger pour les enfants, la réforme non réclamée par la population. De fait, ce débat sur le divorce en 1882 et le débat actuel sur le mariage gay se prête magnifiquement bien à une application de la thèse développée par Albert Hirschman dans son livre Deux siècles de rhétorique réactionnaire. L'auteur a ainsi repéré trois figures rhétoriques qui servent de base à toute argumentation réactionnaire (dans le sens de réaction à un progrès, ou à une avancée présentée comme tel) :

- L'effet pervers : qui consiste à dire que les effets non voulus de la réformes seront pires ou à l'opposé des bienfaits escomptés. Dans le cas du divorce c'est la multiplication des adultères, l'augmentation de l'inégalité entre l'homme et la femme.
- L'inanité : qui consiste à dire que la réforme ne changera rien. Dans le cas du divorce, c'est le fait de dire que le mariage est une règle naturelle au dessus de la loi et que de toute façon la population ne demande pas le divorce.
- La mise en péril : ici le terme parle de lui-même. Mise en péril de la famille, de la société, des acquis durement obtenus.

Et cela s'applique aujourd'hui au mariage pour tous (essayez, vous verrez) ainsi qu'à tous les combats qui ont jalonné le chemin entre 1884 et nos jours pour la conservation de l'ordre. Car voilà bien ce qui réunit les opposants au divorce en 1884, les opposants à la pilule en 1966, à l'IVG en 1974, au divorce par consentement mutuel en 1975, au PACS en 1999 et les opposants au mariage pour tous en 2013. Ces derniers sont les héritiers d'une tradition politique qui place l'ordre et son maintien au centre de l'argumentation. Il peut s'agir de l'ordre politique, de l'ordre social, de l'ordre moral, de l'ordre familial ou encore de l'ordre religieux. Ce n'est pas une tare en soi, simplement un constat.

Pour en finir avec ma rétrospective historique, du côté des partisans du divorce, on mettait déjà en avant le principe de l'égalité et de la liberté. Tout comme aujourd'hui. Rien de nouveau sous le soleil donc.



Le mariage en question


Et il y a tellement peu de nouveauté qu'aujourd'hui encore, la principale problématique qui sous-tend toutes les autres, c'est celle de la définition du mariage. Il semble que la division se joue d'abord là-dessus, car le mariage n'est pas compris par tout le monde de la même façon. Je vais me permettre de citer une dernière fois la séance parlementaire du 8 mai 1882, un opposant au divorce prend la parole :

"Il [le rapporteur] vous a montré les sociétés humaines se développant, grandissant, s'étendant, s'épurant par les vertus de la famille ; il vous a montré l'homme, retenu au début dans des liens grossiers, se dégageant peu à peu, par étapes successives à travers les âges de progrès, de la polygamie, pour se renfermer, par ses propres lois, dans le mariage indissoluble. (...) Pourquoi l'honorable rapporteur vient-il en même temps vous dire qu'il faut redescendre le cours du progrès?"

Tout est là. En 1884 comme aujourd'hui, pour une partie de la société, le mariage est l'aboutissement d'une société évoluée, un âge d'or naturel qui voit s'unir un homme et une femme dans le but de fonder une famille indissoluble. C'est bien là que réside le problème. Après plusieurs heures de débat, il résulte que bon nombre d'opposants au mariage pour tous, l'amour n'a rien à voir avec le mariage. Ou tout du moins, ce n'est pas ce qui est le plus important. Le plus important c'est la fondation d'une famille, le mariage étant lié directement à la procréation. Cela se tient, rappelons que pour les puristes, l'acte sexuel ne peut avoir lieu que dans le cadre du mariage, et pour les plus puristes encore, l'acte sexuel n'est alors pas protégé car il a pour but la conception de l'enfant. Voilà sur quel modèle se fondent une partie des opposants au mariage pour tous, le modèle du mariage comme prélude à la famille, le mariage comme engagement indissoluble d'un homme et d'une femme. Dans ce système de pensée, le mariage homosexuel est en effet une aberration, car c'est une union non fertile et non naturelle, qui peut être acceptée, mais non dans le cadre institutionnel du mariage. La Grèce antique est d'ailleurs souvent prise en exemple : l'amour entre homme y est banal et répandu, mais lorsqu'il s'agit d'une mariage, c'est toujours un homme et une femme, car l'objectif encore une fois reste la procréation. Cette partie de la société distingue donc en quelque sorte famille et amour.

Oui mais voilà, la définition du mariage a évolué. De nos jours, l'amour dans le mariage est mis en avant. On se marrie de moins en moins par devoir. Rappelons qu'il n'y a pas si longtemps, les époux et épouses étaient choisis par les parents, et un garçon mettant, accidentellement ou non, une fille enceinte était tenu de l'épouser. Cela est aujourd'hui marginal. L'amour comme raison du mariage est communément admise, même chez les couples précédemment cités cherchant à fonder une famille. Cela tient à l'évolution progressive de la société. Le divorce a mis fin au mariage définitif, la contraception et l'avortement ont permis aux hommes comme aux femmes de gérer leur désir ou non d'enfant. Le résultat de ceci c'est une diversification du mariage. Aujourd'hui on peut se marier sans avoir d'enfant par la suite, on peut faire des enfants hors mariage, on peut se marier, divorcer, se remarier, et fonder plusieurs familles, on peut se marier pour institutionnaliser l'amour, ou bien même se marier uniquement pour les avantages que cela offre en terme de droits et de fiscalité. Les combinaisons sont multiples. On peut même ne pas vouloir se marier. C'était la tendance à la mode chez les jeunes dans les années 1970, où l'institution du mariage était en partie rejetée, au nom de la liberté. A ce titre, il est intéressant de noter ce basculement en quelques dizaines d'année puisqu'en 2013 tout le monde semble revendiquer le droit au mariage, ou en tout cas à son mariage.

Ainsi, du côté des partisans du mariage pour tous, c'est l'amour qui prime, ainsi que le droit pour deux hommes ou deux femmes d'être en couple et de fonder une famille. Là aussi l'évolution de la société a bien aidé. La frontière entre masculinité et féminité, ou plutôt entre paternité et maternité est beaucoup moins tranchée. Certaines pancartes vues dans les manifestations du 13 janvier 2013 à Paris résument bien les  positions traditionnelles de l'homme et de la femme dans le couple, un peu clichées, qui tendent à disparaître si ce n'est pas déjà fait. On a pu lire par exemple "une mère pour la tendresse, un père pour la discipline". L'image du père autoritaire, chef de famille, et de la mère tendre et délicate, ne recouvre plus guère une vérité générale. On peut être un homme sans être autoritaire, on peut être un homme et être une fée du logis, comme on peut être une femme sans être particulièrement tendre ou habile dans les tâches ménagères. Les combats féministes n'ont à ce titre jamais cessé de réclamer la fin des discriminations et l'égalité homme/femme. Le clivage se situe là, entre ceux qui pensent que les rôles de l'homme et de la femme dans le couple ne sont pas interchangeables, et ceux qui pensent au contraire qu'un homme peut très bien assurer le rôle traditionnellement dévolu à une mère et vice versa. Entre égalité et complémentarité. Simple arithmétique : si la femme est l'égale de l'homme, alors la réciproque est vraie et l'un peut bien se substituer à l'autre, par exemple dans la famille. Ou alors on déclare la femme complémentaire de l'homme et l'on voit bien les réactions qu'il y a eu en Tunisie en août 2012 lorsque la nouvelle constitution prévoyait d'employer cette expression...

Le débat actuel prendrait donc ses racines dans la définition même du mariage et de la famille. Des logiques différentes sont à l'œuvre dans chaque camp et ces logiques sont les fondements sur lesquels s'établissent les autres antagonismes. Tout part de là, que ce soit la question des enfants en général, de l'adoption ou encore de la procréation médicalement assistée.